Le piéton, ce criminel – Ray Bradbury

The Pedestrian, nouvelle de Ray Bradbury (1951) – Traduit par RICHARD NEGROU « L’arriéré »

Larrieré

PÉNÉTRER dans ce silence – celui de la ville à huit heures d’une soirée brumeuse de novembre -, fouler l’asphalte gondolé des rues, marcher sur l’herbe qui avait poussé entre les fissures et, les mains dans les poches, s’ouvrir un chemin à travers les silences environnants, c’était la plus grande joie de M. Léonard Mead. Il aimait s’arrêter à un croisement, scruter dans quatre directions les longues avenues éclairées par le clair de lune, décider du chemin à prendre (ce qui à vrai dire n’avait que peu d’importance : dans ce monde de l’an 2052, il était un nomme seul, ou peu s’en fallait) puis, la direction choisie, se mettre en marche à grands pas et lancer devant soi de grandes bouffées d’air glacé, semblables à la fumée d’un cigare. Lire la suite

Les gifs animés par l’absurdité

Le « Graphics Interchange Format », connu sous le terme de GIF, permet une alternance dynamique d’images. Percutantes mais limitées, Romain Laurent semble tirer le meilleur de ces images animées.

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Le photographe détourne le réel afin  de mieux placer ses personnages dans des situations absurdes.  Lire la suite

Scènes urbaines décalées, à Manhattan

Les situations absurdes imaginées par Romain Laurent jouent sur des personnages hors-contexte et des scènes de vie urbaine détournées. Manhattan accueille ainsi des gens en pleine chute, « dans leurs bulles », inclinés ou encore en train de surfer.

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Voici une perspective décalée sur la vie des newyorkais. Lire la suite

Le meilleur des nids de poule

Oui, nos rues sont dans un état lamentable. Le climat mais aussi la mauvaise conception, le mauvais entretien et parfois même la corruption, font que les creusasses apparaissent n’importe où. Voici un florilège des détournements humoristiques de nids de poule.

Nid de poule couve.jpg

Comme ça peut être le cas lorsqu’on se déplace en voiture ou en vélo, le nid de poule peut enrager mais il peut aussi faire sourire. Lire la suite

Le Trésor caché du Canal Saint-Martin

Le Canal Saint Martin, c’est la nature aménagée par l’Homme au cœur de Paris.
Depuis quelques jours, c’est aussi la nature de l’Homme qui est dévoilée aux yeux de la cité.

Le Canal Saint-Martin - Le trésor caché

En fouillant le canal pour en sortir ce qu’on y trouvait, l’escouade de nettoyeurs des fonds pensait-elle trouver un trésor? L’opération consistait plutôt à vider le canal, pour le rénover et en restaurer les écluses. Lire la suite

Les pylônes ont-ils une âme?

D’immenses pylônes transportent l’électricité sur leurs autoroutes de filage, jusqu’aux villes et aux villages. Les paysages cisaillés par les coupes d’arbres, accueillent des géants gênants, désincarnés. Structures anonymes aux formes standardisées, les pŷlones se contentent d’exprimer leur fonctionnalité.  C’est pourquoi on est en droit de se demander: y a t’il quelque chose de beau, dans cet objet si important et si banal à la foi?

The Land of Giants Proposal for 2018 Pyeongchang Olympics, Korea

Choix+Chine Architects: « The Land of Giants » – Pyeongchang (Proposition pour 2018)- Corée du Sud.

Et  pourtant, il suffit de peu pour détourner l’utilitaire pour mieux rendre honneur aux formes du paysages. Lire la suite

Le transport sur ressort de Disney, imaginé en 1943

Le court métrage d’animation « Victory Vehicles » réalisé par Jack Kinney et produit par les studios Disney, voit Dingo utiliser un moyen de transport révolutionnaire: le pogostick.

Assis au soleil, en pleine fonte des glaces

Nous sommes assis au soleil, passifs devant les changements climatiques. Des personnages qui fondent se présentent à l’image de notre confortable indifférence. L’oeuvre de  Nele Azevedo réalisée éphémèrement à Berlin, Allemagne a été constituée de plus de mille personnages de glace pour une campagne WWF Germany afin de sensibiliser au réchauffement planétaire.

Monumento-Minimo-Santigo-do-Chile-Agosto-2012-photo-Nele-Azevedo180-620x465L’inaction face aux changements climatiques contraste avec l’urgence de la situation. Lire la suite

Des personnages miniatures face à la conjoncture

Isaac Cordal allie sculpture et photographie pour produire des messages très critiques envers la conjoncture sociale et environnementale que nous connaissons. Cet artiste espagnol a notamment produit une série « Clement eclipses » qui représente les leaders mondiaux discutant du climat alors qu’ils sont submergés par la hausse du niveau des mers.

Isaac Cordal miniatures

Isaac Cordal place des personnages miniatures dans des mises en scènes insolites, tentant ainsi de révéler l’absurdité de nos sociétés: discutant, textant, ou consommant pendant que la planète se dégrade. Ces actes anodins s’éternisent pendant que les solutions globales sont de plus en plus urgentes. Lire la suite

Montréal post-apocalyptique vu par les années ’60

Avec le court-métrage 23 skidoo (de Julian Biggs) , datant de 1964, on découvre un Montréal désertique post-apocalyptique.

Skidoo

23 skidoo par Julian Biggs, Office national du film du Canada

https://www.onf.ca/film/23_skidoo_fr/embed/player

Cette fiction en noir et blanc capture des scènes surréelles d’une ville sans vie.

Erreurs élémentaires: la ville de travers

Erreurs de conception ou erreurs de construction, voici un petit tour d’horizon des absurdités urbaines. Ces perles du génie civil, de l’architecture et de la signalisation routière démontrent une capacité d’opérationnalisation hors du commun!

MarocLa plantation d’arbres, ça semble si naturel…
Est-ce l’application à la lettre d’un plan d’aménagement? Lire la suite

« Il était une fois…demain » par Chris Morin

Dans sa série d’oeuvres « Il était une fois…demain », Chris Morin s’imagine les grandes villes du monde, submergées par la nature. Son propos est un mélange d’utopie écologiste et de dystopie de la ville actuelle. Le bitume et l’asphalte, rois et reines de l’espace urbain sont envahi par la végétation.

New York City - Manhattan

 « À l’aube du XXI ème siècle, à la suite d’un événement de nature inconnue, les hommes ont disparu de notre planète. Peu à peu, la nature a repris ses droits dans les contrées les plus urbaines, pour donner naissance à un monde… transfiguré (…)» Lire la suite

« En orbite », maximisation de l’espace industriel

La roue tourne sur elle même et permet d’utiliser la hauteur d’un bâtiment industriel de Brooklyn. Les artistes Ward Shelley et Alex Schweder proposent un nouveau mode de cohabitation à travers l’oeuvre « In orbit ». Pendant 10 jours, les deux artistes ont vécu dans cette roue de plus de 7,5 mètres de hauteur. L’un s’est installé à 9 mètres au dessus du sol, tandis que l’autre a pris ses quartiers à l’intérieur de la roue. Passant du bureau, au fauteuil ou au lit, les deux artistes doivent coordonner leurs mouvements.

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Une « cuisine-salle de bains » a même été intégrée…! Ce mode de vie offre un confort spartiate, s’apparentant aux vols spaciaux, d’où le nom de l’oeuvre « en orbite » et les combinaisons oranges des deux artistes.  N’y a t’il pas quelque chose à tirer de cette utilisation de l’espace? Lire la suite

Urbex: les explorateurs urbains

En hauteur, au sommet des gratte-ciel, on découvre des paysages magnifiques. Cependant, les points d’observation sont rarement accessibles, souvent privés et fermés au public. Les explorateurs urbains vont à l’assaut de ces panoramas  de l’extrême et nous offrent des perspectives stupéfiantes. Partout à travers le monde, des passionnés en font une manière de voyager, une façon de redécouvrir la ville et de se procurer des sensations fortes.

On désigne ces explorateurs de « skywalkers », ceux qui marchent dans le ciel . Un goût du risque autant qu’un esprit militant anime ces intrépides photographes et squatteurs des hauteurs. N’hésitant pas à sauter une clôture, à ouvrir une porte close ou à escalader un mur, ils s’approprient la ville le temps d’une prise de vue et parfois un peu plus.

Rooftopping movment

En Angleterre, le mouvement « urbex » est né de la contraction du mot « urban » et « exploration ». Les « urbexplorateur »  n’hésitent pas à utiliser des termes propres au design urbain afin d’affirmer une appropriation consciente de la ville. Le mot « sloap » (Space Left Over After Planning) est un espace résiduel, un lieu que l’aménagement urbain a laissé de côté, et c’est ce genre d’endroits qui est leur cible. Lire la suite

New York face à la hausse du niveau de la mer

Adapter la ville aux changements climatiques, c’est aussi prévoir la hausse du niveau de la mer. De nombreux endroits sur terre sont menacés et notamment les grandes villes américaines côtières.

New York a longtemps profité de sa position géographique mais face a des inondations récurrentes, des solutions durables devront être trouvées.

Le Directeur du département d’urbanisme de New York a récemment affirmé que les barrières anti-inondations telles qu’elles ont été construites à Rotterdam pourraient protéger la ville des ouragans, des tempêtes et des inondations qui risquent de frapper la ville de plus en plus souvent. Il faut dire que l’expertise néerlandaise en la matière est forte: 15% des Pays-Bas sont constitués de polders. C’est à dire que l’urbanisation s’est faite en gagnant du terrain sur la mer, la plus part du temps par ensablement et construction de digues. De nombreuses villes sont construites sous le niveau de la mer mais qu’arrivera t’il des villes qui n’ont pas été prévues pour cela?   Lire la suite

Au sommet des gratte-ciel

Lire Montréal

Affiche lire Montréal 2013

Noctambule

Je vis dans l’ombre. J’aime la couleur de la nuit, j’aime marcher sous la pluie, j’aime rester tapis. Dans mon quartier, quand les rues sont vides, j’aime aller là où les autoroutes s’entrecroisent. À cet endroit, il y a plus de bruit, une sorte de clameur ronronnante qui berce l’ennui. Certains véhicules laissent échapper des bruits sourds, d’autres font vibrer la rue, chacun s’illustrant au concert des noctambules d’acier. Les moteurs tonnent sans écouter la nuit. C’est pourquoi on les domine, lorsqu’on prête l’oreille : le vacarme des autos est celui du temps compté.
Égrenant le temps, j’aime m’arrêter un peu. Les colonnes d’Hercule qui se dressent devant moi, marquent la frontière avec le monde de l’urgent. Ces piliers de béton qui montent vers le ciel, sont les monuments du temps pressé. Là-haut, on ne peut pas s’arrêter, seules comptent les secondes écoulées et les lieux à dépasser. Aux pieds du colosse de béton, on pourrait se sentir opprimé. Mais ce n’est pas le premier sentiment, on se sent d’abord terriblement humain.
Fragile et délicat, voici le bruit de mes pas. Ceux-ci veulent reprendre voix. Ils m’invitent à crier, à reprendre pied. Retrouver les rues tranquilles, quitter ce brouhaha : il devient pressant d’aller ailleurs. Le géant de béton ne ménage pas son voisinage. Quelques temps à ses côtés et l’échangeur Turcot vous invite à circuler, de préférence vite et loin. Cet enchevêtrement d’autoroutes n’est pas fait pour les badauds. C’est pour cette raison que j’aime aller m’en rapprocher, pour défier le monstre et retrouver mon humanité.
On ne saurait résister trop longtemps à un adversaire trop grand et trop fort. Alors, je m’engouffre dans le silence de mon quartier, là où la feuille morte a toute sa mesure et virevolte à sa guise. Le calme des rues endormies profite au vent qui souffle tranquillement. Les lampadaires sont hésitants, certains s’éteignent, d’autres clignotent, conscients de lutter face à une noirceur opiniâtre et acharnée. C’est le monde du silence, de la pénombre et de la rêverie qui règne à ce moment autour de moi.
Mes pensées reprennent de plus belle, m’emportant dans une sorte de chasse-galerie où l’échangeur n’est plus une frontière, ni un voisin bruyant, mais un simple souvenir du temps jadis.
Devenu ruine, Turcot semble moins imposant. Les marques de l’érosion se font sentir, et la végétation l’a pris d’assaut. Les lianes coulent de son tablier et se moquent des calculs de portées. Les lézardes laissent place au lichen, dont le velours vert contraste avec la rouille pourpre. Les nids de poules sont des refuges accueillants depuis qu’on a cessé de les traquer. Au sommet, fourmis et mésanges fanfaronnent, fiers d’utiliser un perchoir si emblématique.
Rapidement usé, ridé et démodé, le temple de la vitesse n’est plus. La nature, comme les voitures l’étaient au par avant, peut se montrer sans pitié. Elle a dévoré le béton, rompu l’acier et imposé sa loi. Expropriée, l’asphalte laisse peu à peu place au désordre végétal. Aveu d’échec ou changement de paradigme, les ingénieurs on d’abord essayé de se faire jardiniers et horticulteurs. Mais rien y a fait, aucune pelouse, aucun buisson n’a tenu le coup face aux ronces, aux herbes à poux et à la luzerne. La friche a un caractère anarchique que le planificateur tolère peu.
Il faut dire qu’en bon gestionnaire, chaque décideur entend rationaliser l’espace. Comme si la ville était un outil ou une machine, on aménage, on déménage et on façonne en fonction d’une modernité toute relative. C’est ainsi que ce lieu a tour à tour été façonné par les sulpiciens, les compagnies ferroviaires puis les ingénieurs civils. À chaque époque, les nouveaux besoins ont justifié qu’on coupe des arbres, qu’on démolisse des logements ou qu’on enclave certains secteurs de la ville. Les ouvriers du coin n’ont jamais bronché. Ils constituaient les rouages d’une frénésie industrielle qui les nourrissait autant qu’elle décidait de leur sort.
Il en va de même pour certains automobilistes qui se sont retrouvés prisonniers de la route alors que celle-ci était censée leur offrir du temps et une meilleure qualité de vie. L’entonnoir de flux routiers retenant captifs de plus en plus de voitures et de camions, et cela pendant des heures, on n’eut d’autre choix que d’abandonner l’échangeur Turcot. Avant d’en arriver là, une véritable lutte a eu lieu. Il faut dire que certains captifs de la route réclamaient qu’on rase Saint-Henri au complet pour régler durablement le problème de la congestion. Face à cet ultime affront, les anciens ouvriers et les nouvelles familles du quartier ont occupé l’échangeur et paralysé la circulation jusqu’à ce que plus aucun véhicule n’emprunte Turcot. Durant des mois et des semaines, l’occupation a mobilisé la population locale. De plus en plus de familles allaient piqueniquer sur le viaduc, boire un café ou simplement prendre une marche, le but était de participer au blocus. Des mois plus tard, une fois le viaduc rouvert, plus personne n’utilisa cette alternative. Chacun avait changé ses habitudes ou avait changé son lieu de vie.
Voilà pourquoi Turcot reste aujourd’hui en friche. Depuis, certains cyclistes militent pour qu’on construise un nouvel échangeur qui soit dédié aux vélos. Mais il y a peu de chance qu’on accède à une telle revendication. Les gens ont maintenant décidé de partager les rues, d’abolir les frontières urbaines et de ne plus dédier un espace public à un seul type d’usager. La ville n’est pas monofonctionnelle, voilà le consensus.
La chimère d’un Turcot végétalisé m’amène alors à des réflexions bien concrètes. Le rêve d’amener la nature en ville peut-il être atteint? Une ville faisant moins de place à la voiture est-elle intrinsèquement contradictoire avec les activités contemporaines? L’utopie verte est elle un leurre, une mode, comme le fut le triomphalisme industriel ou le gigantisme du tout à l’auto?
À l’instant où ces questions traversaient mon esprit, je fus brusquement percuté. Un passant, tournant au coin de la rue tête baissée, venait de cogner son crâne contre le mien.
Étourdi, sonné et surpris, quelques instants furent nécessaires à comprendre qu’il s’agissait d’une simple collision avec un promeneur du soir.
Sorti brutalement de mes pérégrinations chimériques dans un Turcot fleuri, je restais tout étonné qu’un piéton m’ait fait aussi mal. D’autant plus que ce dernier s’enfuit soudainement, sans mot dire, me laissant là, seul, à le maudire.
Moi qui voulait faire plus de place à l’humain, le voilà qui se présente en véritable danger. La ville est-elle trop dense pour qu’on puisse penser et marcher seul dans la nuit sans se faire frapper par un noctambule? Est-ce donc qu’il faille être ermite pour ne pas être heurté?
Mes questionnements étant de plus en plus contradictoires, je décide de cesser de penser.
Rationalisant mon itinéraire pour rentrer le plus rapidement possible, les rues qui m’avaient inspiré quelques instants auparavant deviennent d’interminables corridors de pas-perdus. Je décide de donner un caractère monofonctionnel à mon activité nocturne : dormir.
Mais la nuit, comme la nature, ne se laisse pas dompter facilement. Penser, remuer dans le lit, ainsi se matérialise mon insomnie.
Je maudis mes rêveries de promeneur de nuit, les feuilles mortes qui volent au vent, les lianes et le ronronnement de Turcot. La nuit, le temps est compté car on l’emprunte au sommeil. Être pressé de dormir n’aide pas, je suis bloqué, en pleine congestion de pensées.
Comme si les petits rêves étaient de petits véhicules qui vont mieux lorsqu’ils vont doucement, un à un, sur les routes de la nuit. »

Félix Gravel. Extrait de texte, Mention du Prix Lire Montréal 2013 http://spacing.ca/montreal/2013/06/03/prix-lire-montreal-2013-noctambule-par-felix-gravel/

L’initiative de Lire Montréal est à découvrir, elle vise notamment à « lire un quartier, mettre en valeur des lieux et participer au développement communautaire »